Frédéric Joulian. Livre 4. L’anthropologie des techniques et l’animation de la revue ... 1/2
Mathieu Hilgers – Pour commencer ce dialogue, on pourrait vous adresser l’un de vos arguments: votre propos, plus largement votre œuvre, n’a pas seulement une origine sociohistorique, il émerge aussi du contexte épistémologique qui l’a rendu possible. C’est dans un contexte ambivalent, soumission, subversion, fascination, rejet du savoir occidental que de nombreux intellectuels africains se sont formés.
Ce texte propose une réflexion sur ce que sont les spécificités de l’enquête de terrain menée dans Internet ou prenant pour objet des usages des communications électroniques.
La pratique interdisciplinaire est une pratique quotidienne du chercheur qui le conduit à cheminer par des contre-allées, à prendre de la distance par rapport à son corpus disciplinaire de référence et à interroger la fragilité des frontières. Cela demande parfois de l’indiscipline et suscite des moments de frilosité scientifique.
La nécessité de produire et d’interpréter un matériau empirique en phase avec l’expérience donne à l’observation participante une importance et un rôle qui dépassent de loin les limites disciplinaires. Pourtant, en raison de son caractère particulier, la validité des résultats issus de cette méthode apparaît souvent limitée et, un jour ou l’autre, la plupart des anthropologues se confrontent à une série de questions identiques. Comment opérer un passage du singulier au général? Comment amplifier la portée des données produites par l’observation participante?
En 2006, le parlement de la République démocratique du Congo adoptait à l’initiative des organisations non gouvernementales une loi visant à criminaliser les actes de violence sexuelle et à protéger les victimes. Cette innovation importante qui a conduit à transposer dans le droit national un certain nombre de crimes et d’infractions sexuels tels que définis dans les conventions internationales se heurte pourtant à des obstacles importants quant à la mise en œuvre des dispositions de la loi.
L’anthropologie a un atout majeur, sa méthode empirique (l’enquête de terrain prolongée), mais elle est parfois trop prisonnière de son passé exotique et primitiviste, et trop encline à un repli identitaire disciplinaire. C’est le cas en particulier de l’anthropologie africaniste qui doit renouveler profondément ses objets comme ses concepts. Elle doit aussi mieux prendre en considération la contribution de la production de connaissances à des entreprises de réformes, et s’intéresser à des enjeux non seulement intellectuels mais aussi sociaux.